Travaux sur un élément d’équipement exclu et 1792-7
Bonjour à tous !
Je vous propose aujourd’hui de nous pencher sur un récent arrêt de la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation du 25 septembre 2025 excluant l’application de l’article 1792-7 du Code Civil.
Civ 3ème, 25 septembre 2025, n° 23-18.563
Vous le savez certainement, l’article 1792-7 du Code Civil dispose que ne sont pas considérés comme des éléments d’équipement d’un ouvrage au sens des articles 1792 et suivants, les éléments d’équipement dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage.
Cet article avait été instauré par l’ordonnance de 2005 pour sortir du champ des garanties légales certains éléments d’équipement d’un ouvrage, pour contrer une jurisprudence de la Première chambre civile qui intégrait tous ces éléments d’équipement aux garanties légales, conduisant à étendre le champ d’application de l’assurance obligatoire.
1792-7 permet ainsi d’exclure du champ de la responsabilité civile décennale certains éléments d’équipement, grâce à un double critère cumulatif :
- La fonction professionnelle de l’équipement
- Le caractère exclusif de la fonction professionnelle
Le législateur n’ayant toutefois donné aucune définition de cet élément d’équipement, et la doctrine étant divisée, les juges du fond ont rendu depuis 2005 des arrêts contradictoires, au gré des territoires et des juridictions.
Jusqu’à très récemment, la Cour de Cassation avait toujours rendu des décisions qui écartaient l’application de 1792-7.
Ce n’est que dans un arrêt rendu le 6 mars 2025 que la Cour de Cassation a pour la première fois admis la présence qu’un élément d’équipement avait une fonction exclusivement professionnelle, au sujet d’un séparateur d’hydrocarbures permettant le traitement des eaux usées et boueuses d’une station de lavage automobile.
Civ 3ème, 6 mars 2025 n° 23-20.018
Au contraire de cette décision, l’arrêt du 25 septembre 2025 rejoint tous ceux rendus précédemment, excluant l’application de l’article 1792-7 au sujet de travaux réalisés sur un existant, à savoir la réfection du revêtement réfractaire de la chaudière gaz, des fours et des gaines de liaison d’une unité de production d’ammoniaque.
Une société dont l’activité était la production et la vente de produits chimiques, avait confié des travaux de réfection du revêtement de la chaudière gaz, des fours et des gaines de liaison d’une unité de production d’ammoniaque à un constructeur.
Après réception, elle a constaté des fuites d’eau et de vapeur, la contraignant à arrêter l’unité de production, si bien qu’elle a assigné le constructeur et ses assureurs RC et RCD en indemnisation de ses préjudices, chiffré à près d’un million d’euros.
Contestant sa condamnation au titre de sa RC décennale, le constructeur a formé un pourvoi, estimant que dans la mesure où ses travaux de réfection avaient été exécutés sur un élément d’équipement dont la fonction était exclusivement professionnelle, à savoir les fours de l’usine, qui était donc exclu des garanties légales de responsabilité, alors lesdits travaux de réfection devaient également se trouver exclus.
Le pourvoi a été rejeté sur ce moyen, la Cour de Cassation soulignant le fait que pour procéder à la rénovation du revêtement réfractaire des composants de l’unité de production d’ammoniaque, le constructeur avait eu recours à des techniques de travaux de construction.
Il avait en effet déposé les anciennes briques, fabriqué de nouvelles afin de les poser à l’intérieur de chacun des composants au moyen de travaux de maçonnerie, après application de plusieurs couches de mortier et de béton, en les ancrant aux cheminées industrielles.
La 3ème Chambre Civile a ainsi considéré que ces travaux constituaient, en eux-mêmes, un ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil, si bien qu’ils ne relevaient pas des éléments d’équipement visés à l’article 1792-7.
En effet cet article ne concerne que les éléments d’équipement, et non les ouvrages.
La Cour de Cassation ne s’est attachée qu’à la détermination de la nature des travaux neufs, sans prendre en compte le fait que le support existant était lui exclu comme étant à vocation exclusivement professionnelle.
On peut penser que la réalisation de travaux de maçonnerie a certainement fait pencher la balance en faveur de la non-application de 1792-7.
Par cet arrêt, la Cour de Cassation rappelle que si les travaux litigieux constituent en eux-mêmes un ouvrage, 1792-7 ne peut pas s’appliquer.
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