Désordre esthétique, standing de l’immeuble et impropriété à destination.
Désordre esthétique : le standing de l’immeuble compte dans l’appréciation de l’impropriété à destination (Civ. 3ème, 12 mai 2021, n° 19-24.786).
Un maître d’ouvrage a confié à un architecte la maîtrise d’oeuvre de la construction d’une résidence hôtelière.
Se plaignant de désordres, il a assigné le maître d’oeuvre, l’entreprise principale et ses sous-traitants pour les lots carrelage et plâtrerie, ainsi que leurs assureurs.
Les désordres dénoncés affectaient les murs des chambres, des salles de bain et des WC. Ils consistaient en des décollements en cueillies des plafonds dans les chambres, des décollements du doublage des murs porteurs, des fissurations de carreaux de faïence sur les murs des salles de bains, et des fissurations verticales au droit des plaques murales dans les WC.
L’expert judiciaire désigné a considéré qu’il n’y avait aucune atteinte à la solidité, ni de risque pour les personnes. Il a toutefois précisé qu’il ne s’agissait pas d’un simple désordre esthétique dans la mesure où l’habitabilité des chambres était réduite du fait de l’isolation dégradée, alors que l’hôtel devait recevoir des cadres et des stagiaires travaillant tard dans leur chambre.
Devant la Cour d’Appel, les constructeurs et leurs assureurs ont soutenu qu’il n’était question que d’un désordre esthétique. Les Juges ne leur ont pas donné raison. Ils ont estimé que les désordres rendaient l’ouvrage impropre à sa destination en ce qu’ils l’affectaient dans son habitabilité, en présence de désordres généralisés, dans la quasi-totalité des chambres et également une grande partie des salles de bain et des WC.
La Cour de Cassation a approuvé la position des Juges d’appel. La Haute Juridiction a souligné que les désordres compromettaient l’esthétique et l’habitabilité de l’immeuble, et qu’ils le rendaient impropre à sa destination dès lors qu’ils affectaient des éléments essentiels des salles de bains et des WC, à savoir les carrelages et les murs porteurs. Dès lors que les désordres rendaient inhabitables des chambres d’une résidence hôtelière de haut standing, leur nature décennale devait être retenue.
Depuis un arrêt de principe de 2013 (3ème Civ, 4 avril 2013, n° 11-25198), la Cour de Cassation admet qu’un désordre esthétique puisse recouvrir le caractère décennal en rendant l’immeuble impropre à sa destination. Est prise en compte la situation particulière de l’immeuble.
En l’absence de caractère particulier de l’immeuble, c’est-à-dire s’il n’est pas de haut standing, le désordre esthétique risque de ne pas être considéré comme étant de nature décennale (3ème Civ, 9 septembre 2019, n° 18-19.353).
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