Responsabilité avant réception – vidéo

responsabilité avant réception
Le 8 juin 2021

Bonjour, je suis ravie de vous retrouver pour une nouvelle vidéo, et nous allons aborder aujourd’hui la responsabilité des entreprises avant réception.

 

Lorsqu’on évoque la question de la prise en charge par les entrepreneurs des dommages en cours de chantier, on est naturellement tenté de poser le débat en termes de responsabilité : qui est responsable ? Qui doit prendre en charge les réparations ?

 

S’agissant des dommages aux travaux neufs, il convient d’opérer une distinction entre les différentes catégories de dommages.

1) Pour tout ce qui concerne la réparation des dommages qui viendraient à affecter les ouvrages en cours d’édification, avant qu’ils ne soient réceptionnés par le Maitre d’ouvrage ou son mandataire, la question n’est pas traitée par le Code Civil sous l’angle de la responsabilité mais sous celui du transfert de risques.

L’Article 1788, qui n’est cependant pas d’ordre public et donc susceptible d’aménagement contractuel dans un contexte hors droit de la consommation, attribue la perte des ouvrages construits avant réception, au seul débiteur de l’obligation de construire, c’est-à-dire à l’entrepreneur.

La réparation des dommages issus d’un incendie, d’un dégât des eaux, ou résultant de vices de construction qui viendraient à affecter les ouvrages objets du marché dont est titulaire l’entreprise, demeurent à sa charge. Il en ira de même des pertes résultant par exemple d’un vol sur le chantier. Il n’a donc pas à être rémunéré pour cela Cass Civ 3ème 15 novembre 1995 N° 94-12100

N’étant pas dans le cadre de la mise en œuvre d’un régime de responsabilité, il n’y a donc pas de place pour des exonérations au titre de la cause étrangère par exemple : les faits d’un tiers ou d’un colocateur, de vandalisme, d’émeute ou de terrorisme ne sauraient donc avoir d’effet sur le mécanisme établi par le Code Civil. Cass Civ 1ère 09 novembre 1999 97-16.306

 

2) Pour ce qui concerne en revanche, les préjudices immatériels résultant par exemple pour le maitre de l’ouvrage du retard pris par le chantier, en raison des dommages matériels ayant affecté les ouvrages en cours d’édification, ou encore des dommages aux ouvrages de colocateurs, on en reviendra à la mise en jeu des régimes de responsabilité classiques.

+ Vis-à-vis du Maitre de l’ouvrage, l’entrepreneur est classiquement reconnu débiteur d’une obligation de résultat, celle de livrer un ouvrage exempt de vice à la date promise.

Le retard, sous réserves des clauses de pénalité de retard, demeurent donc à sa charge, avec cependant en ce cas, des possibilités d’exonération si le retard trouve son origine dans une cause étrangère, tel que le fait d’un tiers au chantier, étant précisé que ses colocateurs ne sont pas considérés comme tiers, car l’extériorité indispensable pour établir la cause étrangère fait défaut dans ce cas.

+ Vis-à-vis des colocateurs, l’entrepreneur ne pourra être recherché que sur un fondement délictuel, puisqu’aucun lien contractuel ne les relie les uns aux autres, avec cette fois l’obligation de prouver la faute de l’entrepreneur.

C’est sur ce fondement qu’il pourra tenter de récupérer une partie des pertes subies sur ses propres ouvrages avant réception, si elles trouvent leur origine dans le fait fautif d’un colocateur par exemple.

 

3) Pour ce qui concerne enfin les dommages aux tiers riverains

On sait que la célèbre jurisprudence dite « George V » a fait des entrepreneurs des voisins occasionnels, et à ce titre, débiteurs d’une responsabilité sans faute vis-à-vis des riverains du chantier au titre de la jurisprudence sur les troubles anormaux de voisinage.

Cass Civ 3ème 22 juin 2005 N° 03-20068

Dans la mesure en effet où le Maitre d’ouvrage aura indemnisé en premier lieu les riverains victimes de troubles anormaux de voisinage en raison du chantier, la jurisprudence n’a pas hésité dans ce cas à le subroger dans le droit des tiers riverains.

Cela va permettre alors au Maitre de l’ouvrage ainsi subrogé, d’agir au titre de la RC délictuelle sans faute pour troubles anormaux de voisinage, à l’encontre des entrepreneurs eux-mêmes, alors même qu’il est aussi leur cocontractant au titre des différents marchés…

… Pour autant cependant que la présence effective desdits entrepreneurs sur le chantier soit avérée et que les préjudices ne soient pas le fait de l’un de leurs sous-traitants, auquel cas, ce sont ces derniers seuls qui pourront être poursuivis. Cass Civ 3ème 19 mai 2016 N° de pourvoi : 15-16248

S’agissant des dommages aux existants :

Bien que la lecture de l’article 1789 du Code Civil laisserait penser le contraire, la jurisprudence semble considérer que le régime issu de cet article est un régime de présomption de faute, qualifiée aussi « d’obligation de résultat allégée », en ce sens que, contrairement à une présomption de responsabilité qui ne cède que devant la preuve positive de la cause étrangère, il ne s’agit ici que d’une présomption simple susceptible de preuve contraire, sans pour autant prouver la cause étrangère.

Cass Civ 3ème., 19 mai 2009, n° 08-13467

Cela revient à permettre à l’entrepreneur de s’affranchir de sa responsabilité à propos des dommages causés aux existants en cours de chantier, en prouvant l’absence de faute, ce qui est évidement moins contraignant que la présomption de responsabilité, dont on ne peut s’exonérer que par la preuve d’une cause étrangère.

Voilà, nous avons fait le tour des différentes responsabilités encourues par un entrepreneur avant réception.

 

Les cas d’engagement de la responsabilité avant réception sont donc multiples pour l’entrepreneur, raison pour laquelle il est important de connaître comment le droit de l’assurance aborde ce sujet, ce que nous verrons dans une prochaine vidéo.

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