Réemploi et assurance – vidéo

reemploi et assurance
Le 7 novembre 2023

Réemploi et assurance construction

Bonjour à tous !

Je suis ravie de vous retrouver pour examiner ensemble l’épineuse question du réemploi en droit de l’assurance construction.

Si l’utilisation de matériaux de réemploi n’a pas d’incidence d’un point de vue responsabilité, puisqu’il ne s’agit ni d’une immixtion fautive du maître d’ouvrage, ni d’un fait fautif du constructeur, il n’en est pas de même d’un point de vue assurantiel.

Les assureurs souhaitent en effet utiliser la notion de techniques non courantes pour subordonner leur garantie en cas de réemploi.

Cette volonté des assureurs est toutefois contrecarrée par l’impossibilité légale ou jurisprudentielle d’apporter des restrictions à la garantie liées aux techniques mises en œuvre par l’assuré.

En effet s’agissant de la dommages-ouvrage, l’article A 243-1 du Code des assurances qui instaure les clauses types, énonce dans son dernier alinéa que toute autre clause du contrat ne peut avoir pour effet d’altérer d’une quelconque manière le contenu ou la portée de ces clauses.

Il n’est donc pas possible pour un assureur DO de conditionner sa garantie en fonction des techniques mises en œuvre.

S’agissant des polices RC décennale, c’est la jurisprudence qui est venue appliquer l’interdiction d’une telle pratique, considérant que les clauses ayant pour conséquence d’exclure de la garantie certains travaux de bâtiment qui ne relèveraient pas d’une technique courante, faisaient échec aux règles d’ordre public relatives à l’étendue de l’assurance de responsabilité obligatoire en matière de construction.

3ème Civ, 9 juillet 2003, n° 02-10.270

3ème Civ, 19 juin 2007, n° 06-14.980

Certains assureurs ont alors imaginé inclure dans l’objet de la garantie la mise en œuvre de certaines techniques, pratique qui a également été écartée par la jurisprudence.

Dans une affaire où la nomenclature de l’assureur mentionnait l’utilisation d’une résine synthétique comme activité distincte de celle d’étanchéité, la Cour de Cassation a annulé le refus de garantie qui avait été opposé à l’assuré en raison de l’absence de déclaration de cette activité spécifique.

Elle a rappelé que dès lors que l’assuré intervenait dans le cadre des activités déclarées, l’assureur ne pouvait pas lui opposer un refus de garantie en raison des procédés techniques utilisés.

3ème Civ, 10 septembre 2008, n° 07-14.884

La seule fois où la Cour de Cassation a validé un refus de garantie, c’est quand elle a considéré que le procédé technique n’était pas une simple modalité d’exécution d’une activité, mais l’activité elle-même, au sujet du procédé Harnois, qui est un système de renforcement de charpente.

3ème Civ, 30 janvier 2019, n° 17-31.121

Vous le voyez, il n’est pas possible pour l’assureur d’exiger une absence d’utilisation de matériaux de réemploi pour conditionner sa garantie.

La question se pose alors de savoir si l’utilisation de matériaux de réemploi peut rentrer dans la sphère de la déclaration de risque au moment de la souscription du contrat : est-ce que la réponse de l’assuré à une question relative aux techniques mises en œuvre serait susceptible de l’engager s’agissant du réemploi ?

Il y aurait certainement aggravation de risque en présence de réemploi, si une réponse négative avait été apportée par l’assuré à la question « mettez-vous en œuvre des matériaux issus du réemploi ? ».

Toutefois, cela n’entraînerait pas une déchéance de garantie pour recours devenu impossible, dans la mesure où il serait difficile de prouver un fait fautif de l’assuré, puisque le réemploi a concouru au bilan carbone de l’ouvrage, et que le recours ne serait pas totalement impossible mais seulement plus difficile.

En revanche, une règle proportionnelle pourrait être appliquée.

En matière de garantie facultative, on pourrait imaginer que l’assureur intègre le réemploi dans ses exclusions de garantie, justifiant en ce cas une non-garantie.

Vous l’aurez compris, le réemploi suscite des controverses et une certaine résistance de la part des assureurs.

Pourtant, les éléments réemployés auront en toute logique été validés par des bureaux d’étude et par les contrôleurs techniques.

Comme l’ont souligné certains membres éminents de la Doctrine, le réemploi est une pratique séculaire qui s’inscrit dans la modernité et le futur, particulièrement en ces temps de pénurie de matériaux et de politique environnementale.

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