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Les EPERS
Le 10 mai 2022

Les EPERS

Bonjour à tous ! Aujourd’hui je vous propose de faire le point sur la notion d’éléments pouvant entraîner la responsabilité solidaire, ou EPERS, et qui concerne les fabricants.

Avant la loi Spinetta, le fabricant n’était tenu à l’égard du maître de l’ouvrage que de la responsabilité contractuelle de droit commun, qui pouvait se révéler compliquée à engager au regard de la difficulté à prouver le vice du matériau litigieux.

C’est la raison pour laquelle la loi de 1978 a introduit un article 1792-4 dans le Code Civil qui dispose, je cite :

Le fabricant d’un ouvrage, d’une partie d’ouvrage ou d’un élément d’équipement conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l’avance, est solidairement responsable des obligations mises par les articles 1792, 1792-2 et 1792-3 à la charge du locateur d’ouvrage qui a mis en oeuvre, sans modification et conformément aux règles édictées par le fabricant, l’ouvrage, la partie d’ouvrage ou élément d’équipement considéré.

Vous en conviendrez, ce texte ne brille pas par sa limpidité, et il a soulevé de nombreuses difficultés d’interprétation. La Cour de Cassation a fini par s’orienter vers une conception restrictive de la notion d’EPERS, le rapport du Conseiller rapporteur établi à propos d’un arrêt rendu en 2007 constituant la référence en termes de définition des critères retenus par la Haute Juridiction (Ass Plén, 26 janvier 2007, N° 06-12.165).

Il faut tout d’abord souligner que la notion d’EPERS ne concerne que les fabricants, et non les fournisseurs, et qu’elle ne peut jouer que dans les rapports entre le fabricant et le maître d’ouvrage : un autre constructeur ne peut pas l’invoquer, et devra se tourner vers le droit commun de la vente.

Sont assimilés au fabricant l’importateur ou le distributeur qui a présenté l’élément comme étant son œuvre.

L’article 1792-4 impose également l’existence d’un contrat de louage d’ouvrage entre le maître d’ouvrage et un entrepreneur en vue de la pose de cet élément, excluant ainsi les cas où le maître d’ouvrage achète le matériau pour le mettre en œuvre lui-même, cas qui relèverait de la garantie des vices cachés.

Quant aux éléments concernés, l’article 1792-4 nous dit qu’il peut s’agit tout d’abord d’un ouvrage, comme les maisons préfabriquées, ou bien d’une partie d’ouvrage, comme des murs préfabriqués, ou enfin d’un « élément conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l’avance ».

C’est sur cette notion plutôt confuse que la jurisprudence a dû faire preuve d’imagination pour l’interpréter.

Précisons tout d’abord qu’en vertu de l’article 1792-7, les éléments d’équipement dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage, ne pourront pas engager la responsabilité des fabricants sur le fondement de l’article 1792-4, mais relèveront de la responsabilité de droit commun.

C’est dans le cadre de l’arrêt rendu le 26 janvier 2007 par l’Assemblée Plénière, concernant des panneaux d’isolation thermique, que la Cour de Cassation a posé les bases de sa conception restrictive de la notion d’EPERS, confirmant en l’espèce que lesdits panneaux étaient bien des EPERS dès lors que le fabricant avait déterminé les dimensions des différents panneaux, les avait fabriqués sur mesure pour satisfaire des exigences sanitaires et thermiques spécifiques, et que les aménagements effectués sur le chantier étaient conformes aux prévisions du fabricant.

Depuis cet arrêt, la Troisième Chambre Civile a systématiquement écarté la notion d’EPERS dès lors que l’élément d’équipement n’avait pas été spécialement concu et produit pour l’ouvrage (3ème Civ, 19 décembre 2007, n° 06-19.595 ; 3ème Civ, 27 février 2008, n° 07-11.280).

Pour résumer, l’élément ne doit pas avoir été choisi sur catalogue si l’on veut qu’il revête la qualification d’EPERS : l’élément doit avoir fait l’objet d’une fabrication spécifique pour répondre aux besoins précis du bâtiment en cause. Ainsi, des panneaux isolants, indifférenciés et produits en grande quantité, non fabriqués spécialement pour le chantier, ne sont pas des EPERS (3ème Civ, 15 mars 2006, n° 04-20.228 ; 3ème Civ, 7 janvier 2016, n° 14-17.033).

En revanche, des panneaux réalisés spécialement pour les besoins d’une société et pour répondre à des exigences particulières d’isolation, dans une affaire où le fabricant avait établi le plan de calepinage, avait précisé les directives de pose dans un dossier technique, et où les bons de livraison comportaient les dimensions et les repères au regard du plan de calepinage, ont été considérés comme des EPERS (3ème Civ, 9 mars 2017, N° 15-13.938).

La jurisprudence exige également que la mise en œuvre de l’EPERS doit se faire sans modification (la Cour de Cassation admettant toutefois de simples ajustements), et conformément aux règles édictées par le fabricant.

Si tous ces critères sont remplis, alors le fabricant de l’élément est solidairement responsable du seul locateur d’ouvrage qui a mis en œuvre ledit élément, et est tenu à ce titre de la garantie biennale et décennale envers le maître d’ouvrage.

Voilà, j’espère vous avoir éclairé sur cette notion d’EPERS !

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