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Le castor en droit de la construction
Le 21 novembre 2023

Le castor en droit de la construction

Bonjour à tous !

Aujourd’hui nous allons aborder ensemble la notion de castor qui, sous son appellation presque humoristique, cache une réalité juridique qui peut avoir de lourdes conséquences.

Le particulier qui, pour une raison ou une autre, construit lui-même son ouvrage, est tenu à deux types de responsabilité.

Tout d’abord, le castor, comme on l’appelle, devient un constructeur au sens des articles 1792 et suivants du Code Civil, ce que n’est jamais par exemple un sous-traitant, qui n’est qu’un locateur d’ouvrage.

En effet, l’article 1792-1 du Code Civil dispose qu’est réputé constructeur toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire.

Le maitre d’ouvrage qui construit sa maison et qui la vend quelques années après achèvement répond donc parfaitement à la définition du constructeur au sens de cet article.

Le débat n’est pas que de pure sémantique, car il débouche sur des conséquences juridiques. En effet aux termes de l’article 1792 du Code civil, il faut être « constructeur » pour être assujetti à la RC décennale.

Ainsi, le particulier, bien que non-professionnel de la construction, qui vend la maison qu’il a construite, se trouve assujetti à la responsabilité civile décennale, alors qu’il n’est que très rarement assuré dans ce but.

Il engage alors sa responsabilité envers les futurs acquéreurs dans un délai de dix ans à compter de l’achèvement de ses travaux, sachant que la date à prendre en compte pour apprécier la prescription est non celle de la vente, mais celle de l’action des acquéreurs.

3ème Civ., 19 Septembre 2019, n° 18-19.918

3ème Civ., 7 septembre 2011, n° 10-10.596

Le deuxième type de responsabilité auquel est soumis le castor est celui lié à la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code Civil.

La Cour de Cassation a déjà jugé que la possibilité de mettre en œuvre les garanties légales des articles 1792 et suivants du Code civil, ne fait pas obstacle à l’application des règles relatives à la résolution de la vente lorsque le constructeur de l’immeuble achevé en est également le vendeur.

3ème Civ., 2 mars 2005, n° 03-16.561

L’acquéreur a donc le choix entre l’un ou l’autre régime de responsabilité.

Toutefois, la plupart des actes de vente contiennent une clause d’exonération de la garantie des vices cachés, ce qui pouvait donc priver l’acquéreur de ce recours contre le castor.

La jurisprudence a alors décidé de juger de telles clauses inefficaces en présence d’un vendeur assimilé à un professionnel, comme dans l’hypothèse d’un castor.

3ème Civ, 9 février 2011, n° 09-71.498

3ème Civ, 11 avril 2012, n° 11-13.198

3ème Civ, 10 juillet 2013, n °12-17.149

Dans ce cas, le vendeur est présumé de mauvaise foi, la jurisprudence faisant peser sur lui une présomption irréfragable de connaissance des vices de la chose vendue.

Le castor ne peut alors se prévaloir de la clause d’exonération de la garantie des vices cachés.

Ce deuxième régime de responsabilité peut être particulièrement opportun pour l’acquéreur en cas de prescription de l’action fondée sur la RC décennale, comme l’a rappelé tout récemment la Cour de Cassation dans un arrêt du 19 octobre 2023.

3ème Civ, 19 octobre 2023, n° 22-15.536

Dans cette affaire, une SCI avait réalisé des travaux dans une maison en 2004, puis l’avait vendu en 2017, soit plus de dix ans après.

Se plaignant de remontées d’eau, l’acquéreur a assigné le vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Mais le vendeur s’est prévalu de la clause d’exclusion de cette garantie stipulée dans l’acte, et a été suivi dans son argumentation par la Cour d’Appel, qui a considéré que l’acquéreur ne rapportait pas la preuve que la SCI avait connaissance du vice caché affectant l’immeuble à la date de sa vente.

La Haute Juridiction a cassé la décision en considérant que la SCI s’était comportée en constructeur et devait être présumée avoir connaissance du vice.

Il ressort de cet arrêt que le castor qui a réalisé des travaux qualifiés d’ouvrage depuis plus de dix ans, conserve la qualité de constructeur au sens de l’article 1792-1 du Code Civil, et est donc présumé avoir connaissance des vices de la chose vendue.

Vous l’aurez compris, c’est à ses risques et périls qu’on revêt la qualité de castor !

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