Faute dolosive du promoteur et jurisprudence
Bonjour à tous !
C’est avec grand plaisir que je vous retrouve en ce début d’année 2025 pour de nouvelles vidéos.
Je vous propose sans plus attendre d’évoquer un arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation rendu en fin d’année dernière, et qui portait sur la faute dolosive du promoteur et son incidence sur le contrat d’assurance.
Civ 3ème 21 novembre 2024, n° 23-15.803
L’année 2024 a connu un certain nombre d’arrêts sur le sujet du dol, qui s’inscrivaient dans un mouvement débuté en 2023, la Cour de Cassation ayant consacré cette année-là l’autonomie du dol par rapport à la faute intentionnelle, entendant ce dernier de manière subjective, à savoir la conscience du caractère inéluctable du dommage.
3ème Civ, 30 mars 2023, n° 21-21.084
Pour mémoire, le dol est abordé à l’article L. 113-1 alinéa 2 du Code des assurances, qui dispose que :
« Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.
Toutefois, l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré. »
Par son arrêt du 30 mars 2023, la Haute Juridiction a défini la faute dolosive de l’assuré comme étant un acte délibéré de l’assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables, soulignant également que la faute dolosive n’impliquait pas la volonté de son auteur de créer le dommage.
Auparavant, la jurisprudence adoptait une conception traditionnelle et stricte de la faute intentionnelle ou dolosive, et exigeait une parfaite coïncidence entre le dommage recherché et le dommage réalisé.
2ème Civ, 9 juil. 1997, n° 95-20.799
Postérieurement à l’arrêt du 30 mars 2023, la Cour de Cassation a eu l’occasion de préciser que la conscience du caractère inéluctable des conséquences dommageables ne se confondait pas avec la conscience du risque d’occasionner le dommage.
2ème Civ, 14 mars 2024, n° 22-18.426
Les principaux arrêts rendus sur le sujet depuis 2023 ont exclu la qualification de faute dolosive, permettant ainsi de mobiliser la garantie de l’assureur.
Toutefois, dans un arrêt non publié au Bulletin en date du 21 novembre 2024, la 3ème Chambre Civile a admis l’exclusion légale de garantie pour dol.
Les faits étaient les suivants.
Un promoteur avait fait réaliser un immeuble collectif de plusieurs étages, et la construction avait perturbé le tirage de la cheminée de la maison voisine.
A la suite d’un référé préventif, l’expert désigné par le Tribunal avait attiré l’attention du promoteur à plusieurs reprises dans ses notes, sur la nécessité de rehausser les conduits de cheminée du voisin.
Par la suite, se plaignant de l’impossibilité d’utiliser leur cheminée, les voisins ont assigné le promoteur et son assureur en indemnisation de leur trouble anormal de voisinage.
Le promoteur a été seul condamné par les Juges d’appel, ses demandes formulées à l’encontre de son assureur ayant été rejetées, si bien qu’il a formé un pourvoi.
La Cour de Cassation a confirmé l’arrêt d’appel en rappelant que l’expert judiciaire avait averti le promoteur de la nécessité de rehausser les conduits de cheminée de la maison voisine.
Selon l’expert, la mise en place d’une telle rehausse était une technique bien connue et maîtrisée par les entreprises, l’expert soulignant qu’aucun professionnel de la construction ne pouvait ignorer le litige à naître en cas d’absence de modification de la hauteur de la cheminée.
Ainsi, le promoteur avait eu pleinement connaissance de la nécessité de ces travaux de rehaussement. Pourtant il avait livré l’immeuble sans avoir réalisé lesdits travaux, et s’était borné à proposer cinq ans plus tard, après avoir été assigné en expertise judiciaire, deux autres solutions qui étaient en réalité techniquement et juridiquement non réalisables.
La Cour de Cassation a déduit de ces éléments que le refus délibéré du promoteur de faire réaliser les travaux préconisés, avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables, caractérisait sa faute dolosive.
En conséquence de cette faute dolosive, le promoteur ne pouvait pas prétendre au bénéfice de son contrat d’assurance.
On ne peut qu’espérer que dans ce litige, le promoteur était solvable…
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