Dépassement budget : le maître d’oeuvre est-il toujours responsable ?
Dépassement de budget : les surcoûts dont le maître d’ouvrage est à l’origine ne peuvent pas être imputés au maître d’oeuvre (3ème Civ, 27 mai 2021, n° 19-16.657).
Un viticulteur a confié une mission de maîtrise d’oeuvre complète à une société d’architecture pour la réalisation d’un bâtiment regroupant l’ensemble de son outil de production viticole.
Alléguant un défaut de maîtrise de l’enveloppe budgétaire et des défauts de conception, le maître d’ouvrage a sollicité une mesure d’expertise, avant d’assigner le maître d’oeuvre et les autres intervenants en remboursement des honoraires et en indemnisation de ses préjudices.
Le maître d’ouvrage a réclamé une indemnité de 4.477.000 euros correspondant au dépassement de budget. La Cour d’Appel a toutefois estimé qu’il ne s’agissait pas d’un préjudice indemnisable, et a limité les condamnations à la somme de 100.000 euros.
La Cour de Cassation a donné raison aux premiers Juges.
Selon le contrat de maîtrise d’oeuvre, il appartenait au maître de l’ouvrage de fixer le programme fonctionnel auquel l’architecte devait répondre.
L’avant-projet sommaire (APS) mentionnait une enveloppe financière de 11,4 millions d’euros pour une construction de 10.845 m2.
Toutefois, à la demande du maître d’ouvrage, le projet avait évolué, le dernier chiffrage faisant état de 13,8 millions d’euros et la demande de permis de construire mentionnait une surface de 14.477 m2.
La Cour de Cassation a noté que les évolutions du projet étaient le fait du maître de l’ouvrage. Celui-ci avait eu pleinement connaissance, avant la signature du contrat de maîtrise d’oeuvre, de l’évolution de l’estimation financière résultant des modifications du bâtiment. De surcroît, il avait signé les ordres de service établis sur la base des offres des entreprises consultées.
Dès lors, la Haute Juridiction a conclu que la différence entre l’enveloppe financière mentionnée dans l’APS et le coût final de la construction ne constituait pas, en elle-même, un préjudice indemnisable.
En l’occurrence, les Juges ont ainsi déterminé que le maître d’oeuvre ne devait pas être tenu responsable du dépassement budget.
Cette décision est à rapprocher de la jurisprudence constante qui considère que l’architecte, dans le cadre de son devoir de conseil, doit tenir compte des souhaits de ses clients, mais aussi de leurs possibilités financières, et qu’il doit renseigner le maître d’ouvrage sur le coût prévisionnel des travaux.
Une sous-évaluation du montant des travaux engage la responsabilité du maître d’oeuvre, à moins que le projet n’évolue en raison de demandes complémentaires ou modificatives du maître d’ouvrage.
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