Condamnation in solidum des constructeurs : est-elle systématique ?
Condamnation in solidum dans le cadre de désordres affectant un ouvrage : elle n’est mise en oeuvre que si, par leurs fautes respectives, les constructeurs ont contribué de manière indissociable à la survenance d’un même dommage (3ème Civ, 15 février 2024, n° 22-18.672).
Un maître d’ouvrage avait confié les travaux de maîtrise d’oeuvre à une société en vue de travaux de rénovation d’une maison d’habitation.
Différentes entreprises se sont vues attribuer les lots, toutefois les travaux n’ont pas été achevés. Alléguant l’existence de désordres, le maître d’ouvrage a assigné les constructeurs en réparation de ses préjudices.
Devant la Cour d’Appel, l’ensemble des constructeurs ont fait l’objet d’une condamnation in solidum à régler la somme de plus de 180.000 € au maître d’ouvrage. Cela signifie que chacun est tenu de l’intégralité de la dette envers la victime, qui peut alors diriger son recours vers le plus solvable, à charge pour lui ensuite d’agir à l’encontre des autres constructeurs en fonction de leur part de responsabilité (ce qu’on appelle la contribution à la dette).
La Cour d’Appel a considéré que certes le lot gros oeuvre était affecté de malfaçons, mais que les deux autres constructeurs avaient également commis des défauts d’exécution importants. Ils avaient de surcroit travaillé sur des supports de maçonnerie dont ils auraient pu relever les manquements aux règles de l’art grossiers.
Les Juges en ont donc déduit que les constructeurs avaient contribué de manière indissociable à l’intégralité du dommage subi par le maître d’ouvrage, si bien que la condamnation in solidum des constructeurs pouvait être prononcée.
L’arrêt est cassé par la Cour de Cassation, au visa de l’ancien article 1147 du Code Civil, devenu l’article 1231-1.
Il résulte de ce texte que les différents intervenants à l’acte de construire ne peuvent être condamnés in solidum à réparer le préjudice du maître de l’ouvrage que si, par leurs fautes respectives, ils ont contribué de manière indissociable à la survenance d’un même dommage.
En l’espèce, les Juges d’appel avaient retenu que seules les fautes du titulaire du lot gros-oeuvre justifiaient la démolition d’éléments de structure de la maison. Dès lors, les fautes des autres constructeurs n’avaient pas contribué de manière indissociable à la survenance de l’entier dommage, si bien que la condamnation in solidum ne pouvait pas être prononcée.
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