Acceptation délibérée des risques et immixtion fautive

Acceptation des risques et immixtion fautive du maitre d'ouvrage
Le 14 octobre 2025

Acceptation délibérée des risques et immixtion fautive par le maître d’ouvrage

Bonjour à tous !

Dans cette vidéo nous allons revenir sur deux notions qui permettent aux constructeurs de bénéficier d’une exonération de leur responsabilité civile décennale, à la lumière d’un arrêt rendu par la 3ème Chambre Civile le 10 juillet 2025.

3ème Civ, 10 juillet 2025, n° 23-20.135

Rappelez-vous, la responsabilité civile décennale découlant de l’article 1792 du Code Civil n’a pas lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.

Selon la Haute Juridiction, l’acceptation délibérée du risque par le maître de l’ouvrage constitue une cause étrangère et exonère en tout ou partie les constructeurs de leur responsabilité à son égard et à l’égard de l’acquéreur.

Grâce à cette théorie jurisprudentielle, le locateur d’ouvrage est exonéré, totalement ou partiellement, de sa responsabilité lorsque, ayant conseillé et mis en garde le maître de l’ouvrage sur les risques encourus par l’ouvrage à défaut de suivre ce conseil, le maître de l’ouvrage, parfaitement informé, passe outre et accepte délibérément ces risques.

Toutefois, c’est au locateur d’ouvrage d’apporter la preuve de cette cause étrangère, exonératoire de responsabilité, et la jurisprudence exige que le maitre de l’ouvrage, avant la signature des marchés, ait été clairement averti par l’entreprise, des risques encourus s’il persistait dans ses choix.

Par exemple, dans un arrêt du 7 novembre 2024, la Cour de Cassation avait précisé qu’il ne suffisait pas pour le constructeur de conseiller une étude de sol, mais qu’il fallait également avertir le maître d’ouvrage des risques induits par l’absence de réalisation d’une telle étude.

3ème Civ, 7 novembre 2024, n° 22-22.794

Cela illustre les limites de la théorie de l’acceptation délibérée des risques par le maître d’ouvrage.

L’arrêt du 10 juillet 2025 reprend cette position jurisprudentielle, en rappelant que pour que le maître d’ouvrage conserve une part de responsabilité, il ne suffit pas de souligner qu’il a voulu faire des économies substantielles en ne commandant pas d’étude de sol et de béton.

Encore faut-il caractériser en quoi les maîtres de l’ouvrage ont été parfaitement mis en garde et informés, par les locateurs d’ouvrage, des risques encourus par l’ouvrage à défaut de réalisation d’une étude de sol et de béton.

Cet arrêt est également l’occasion d’évoquer une autre des causes exonératoires, à savoir l’immixtion fautive du maître d’ouvrage.

En l’espèce, les Juges d’appel avaient laissé au maître d’ouvrage une part de responsabilité au motif que ce dernier avait participé à la désignation de l’entreprise titulaire du lot gros œuvre…

Fort logiquement, la Cour de Cassation a estimé que ce motif était impropre à caractériser une immixtion des maîtres d’ouvrage dans les travaux.

Si la Haute Juridiction avait suivi les juges d’appel, tous les maîtres d’ouvrage auraient pu se voir imputer une part de responsabilité pour immixtion, dès lors que ce sont eux qui signent les marchés de travaux…

Il est par ailleurs à noter que de façon surprenante, la Cour de Cassation écrit que, je cite « L’immixtion du maître de l’ouvrage n’est fautive que si celui-ci est notoirement compétent. ».

Or en énonçant cela, les Juges lient le caractère fautif de l’immixtion à la compétence, qui sont pourtant deux critères bien distincts et cumulatifs.

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